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"The French label makes the difference!"

« Avoir le label français, ça marche !»

Entretien des Services culturels avec Edouard Duval-Carrié

A l'occasion de la réception de lancement à Miami de France Alumni, réseau social d'élèves internationaux ayant étudié en France, Edouard Duval-Carrié, peintre-sculpteur haïtien de renommée internationale, revient sur son expérience de deux ans à l'Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, à la fin des années 1980.

Edouard Duval-Carrié a participé à l’exposition « Haïti – deux siècles de création artistique » au Grand Palais de Paris, qui s’est tenue de Novembre 2014 à Février 2015. Il participera également en marge d’Art Basel Miami à « l’Abécédarium – le Bal masqué de A à Z », événement spécial organisé par Alexandra Midal et initié par les Services culturels, le 1er décembre 2016 au Perez Art Museum Miami, dans le cadre du programme « Oui Design ».

Il a été décoré Chevalier des Ordres et des Lettres en avril 2016 par le Consul général de France à Miami.

SC: Vous étiez invité aux Beaux-Arts de Paris en 1988 et 1989. Que retenez-vous de ces deux ans de votre vie ?

EDC: C'était la chose la plus extraordinaire qui me soit arrivée. A l'origine géographe et urbaniste, j'ai été invité aux Beaux-Arts dans le cadre d'un projet de coopération, soutenu par le Ministère de la Coopération d'alors, en même temps que les artistes français, Philippe Nouail, et sénégalais, Fodé Camara. J'étais venu pour produire des œuvres en vue d’une d’exposition spécifique, mais in fine, c'était beaucoup plus que ça. Cette expérience m'a offert un véritable accès à l'art et aidé à comprendre le monde de l'art contemporain.

J'ai en effet pu participer activement aux ateliers, à travers un véritable échange entre maîtres et apprentis, de manière très différente de ce qui se fait aux Etats-Unis. J'ai ainsi découvert de nouveaux matériaux, comme la résine, ainsi que des techniques et pratiques comme le moulage. J'ai beaucoup appris à Paris en termes de connaissances sur l'art et de savoir-faire, mais aussi en termes de réseaux.

Votre expérience aux Beaux-Arts a donc eu un impact sur votre travail ou votre carrière ?

Oui, j'ai multiplié les rencontres dans le monde de l'art avec des personnes intéressantes et talentueuses, des galeristes comme des artistes, tels les frères Hervé et Richard di Rosa, ou encore Hervé Télémaque, un compatriote...

Surtout, les Beaux-Arts m'ont permis une véritable ouverture internationale en tant qu'artiste. J'ai ainsi été contacté par de nombreuses institutions culturelles à l'étranger, comme le Musée d'art contemporain de Monterrey au Mexique (MARCO), qui m'a demandé de participer à l'exposition "Les années 1990 dans le Nouveau Monde", ou encore des musées en Yougoslavie et au Danemark, où je me suis rendu. Ils sont tous venus me chercher à Paris…Donc avoir le label français, ça marche !

Mais cette expérience m'a aussi donné une ouverture vers d’autres arts: la photographie, l'animation, le cinéma. J'ai eu la chance de participer à différents projets et films.

Vous êtes aussi Américain ; d’autres villes, aux Etats-Unis, auraient pu vous offrir une ouverture internationale. Quelles particularités offre Paris ?

New York et Los Angeles étaient hors de question pour moi.

J'ai été invité à Paris pour préparer et participer à l’exposition d'art contemporain « la Révolution française sous les Tropiques », présentée au Musée National des Arts Africains et Océaniens en 1989.

Ce travail à Paris a provoqué ma rencontre avec l'Afrique et les Antilles, qui fut une véritable révélation. J'ai été très marqué par l'expérience de réalisation d'un atelier en lien avec les arts africains et océaniens. 

Je me suis ensuite retrouvé à faire la promotion des arts haïtiens et guadeloupéens pour le programme "Afrique et Caraïbes en création" (ndlr: mis en place en 1991 par l'Institut français), à me rendre à Dakar pour une exposition au Musée de l'Institut Fondamental d'Afrique Noire, et à retourner à Haïti pour une exposition aux archives nationales du Musée du Panthéon national haïtien.

Et votre prochaine et dernière exposition en 2016 aura lieu en Guadeloupe...

Oui, deux de mes tableaux seront présentés en Guadeloupe dans le cadre d'une exposition internationale sur l'art contemporain dans les Caraïbes, qui sera inaugurée prochainement au Mémorial ACTe (ndlr.: "Echos imprévus", du 19 novembre 2016 au 30 avril 2017).

Mes deux tableaux exposés proviennent de la collection privée de Jorge Perez (ndlr: fondateur d'origine cubaine du Perez Art Museum Miami, partenaire des Services culturels pour un événement de "Oui Design" pendant Art Basel, "Abécédarium" sur le Bal Masqué, conçu par Alexandra Midal).

En tant qu’Haïtien, quelle relation entretenez-vous avec la France ?

Mes liens avec la France sont très étroits et très cordiaux. Mes enfants sont nés en France.

La France a su maintenir ses relations avec Haïti, à travers des liens forts. Il n'y a pas de rejet entre les deux pays, mais une réelle continuité.

J’ai appris en France qu’on ne pouvait rester cantonner dans son histoire. Il existe en France un véritable sens de la communauté, un respect de l’Autre. C’est le pays des intellectuels et des chercheurs, connectés à l’Autre et qui cherchent à comprendre autrui.

Et comment qualifieriez-vous votre échange avec les Français ?

J’ai toujours été bien accueilli par les Français. La générosité française est incomparable.

Au-delà de ce sens de l’accueil et de leur générosité, la connaissance des Français est incroyable: vous apprenez à travers une conversation avec un chauffeur de taxi. Il existe effectivement à Paris un réseau complexe et organisé, qui permet d’agir de manière différente, inclusive en créant des liens entre politique, sciences et arts. C’est naturel à Paris de connecter ces univers.

Pourquoi avoir quitté la France alors ?

J’étais déjà résident à Miami et risquais de perdre ma carte de résidence. En outre, à l’époque, Paris était beaucoup plus cher que Miami. Je suis donc rentré pour des considérations pratiques.

Votre expérience en France est presque trop belle pour être publiée telle quelle. Un défaut, un regret ?

Il n’y avait aucun hic à mon expérience en France (Rires).

Propos recueillis par Vanessa Selk, Attachée culturelle, Services Culturels à Miami