La littérature française vue de l’étranger
Avec pour grands représentants des auteurs comme Saint-Exupéry ou Jules Verne, la littérature française classique est parmi les plus reconnues au monde. Mais qu’en est-il des auteurs contemporains francophones ? Malgré les rumeurs pessimistes, les lettres françaises se portent bien.
Le charme discret de la littérature française
Malgré un Nobel de littérature attribué en 2014 à Patrick Modiano, l’idée selon laquelle le roman français serait à bout de souffle est une rengaine qu’on entend régulièrement. En décembre 2013, le média britannique BBC News Magazine s’interrogeait : « Pourquoi les livres français ne se vendent-ils pas à l’étranger ? ».
Quelques éléments permettent pourtant de garder espoir. Le français demeure la deuxième langue la plus traduite au monde, juste après l’anglais. La littérature d’expression française est la première traduite aux États-Unis, devant l’allemand et l’espagnol. Preuve que la langue de Molière, qui est aussi celle d’Irène Némirovsky, de Marie N’diaye ou de Dany Laferrière…, tient toujours une place de choix dans les bibliothèques internationales.
Autre bonne nouvelle : selon Gallimard, après une décennie de domination des auteurs scandinaves, le roman noir de langue française ferait un retour en force. Parmi les noms qui retiennent l’attention des éditeurs étrangers, on compte le Suisse Joël Dicker (« La Vérité sur l’affaire Harry Quebert ») et les Français Philippe Georget (« L’été tous les chats s’ennuient ») et Caryl Férey (« Mapuche »).
Des chiffres et des lettres
Qui sont ces auteurs francophones qui drainent un public international ? Avec 14 romans traduits en 48 langues et écoulés à 30 millions d’exemplaire, Marc Levy emballe les foules : il réalise les meilleures ventes en langue française. Ses romans à l’eau de rose provoquent à chaque fois un véritable raz-de-marée dans les librairies. Et cela fait 15 ans que cela dure : « Si c’était vrai », son premier roman, a été le livre le plus vendu de l’année 2000 !
Le succès de Marc Levy, qui assume sans complexe une dimension très « marketing » de l’écriture, tient néanmoins du paradoxe. Adulé par un lectorat populaire, l’auteur est peu considéré par la critique littéraire, qui ne lui pardonne pas ses approximations stylistiques et le côté ouvertement kitsch de ses intrigues.
Michel Houellebecq, l’enfant prodige
Chez Michel Houellebecq, le marketing est plus subtil mais tout aussi efficace. L’écrivain aime jouer les antimodernes. Le personnage désabusé, volontiers provocant, qu’il a pris l’habitude de camper fascine les médias autant qu’il les agace. Il est, aux yeux des étrangers, l’auteur français contemporain par excellence. Les « Particules élémentaires », paru en 1998, fut traduit en 40 langues et s’est vendu à plus de 60 000 exemplaires aux États-Unis : un chiffre considérable pour une littérature moins facile d’accès que les romans d’un Levy.
Couronné par le Prix Goncourt en 2010 pour son livre « La Carte et le Territoire », Michel Houellebecq continue de faire un carton en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Bret Easton Ellis, Gary Shteyngart et toute une génération de jeunes écrivains revendiquent son influence dans leurs œuvres. Paru cette année, son dernier opus Soumission s’est vendu à plus de 100 000 exemplaires en Allemagne, le tout en… trois jours.
Faire bouger les lignes
Autres représentants reconnus de la littérature francophone à l’étranger : des écrivains comme Frédéric Beigbeder, Anna Gavalda ou d’Amélie Nothomb. Certains auteurs parviennent à toucher le jackpot international en un roman. L’Élégance du hérisson, de Muriel Barbery, fut la surprise de l’année 2006, en s’écoulant à 900 000 exemplaires. Katherine Pancol rencontra le succès un an plus tard avec Les yeux jaunes des crocodiles, vendu à plus d’un million d’exemplaires.
Le roman français ne se résume pas à une affaire de chiffres. De plus en plus de maisons d’éditions indépendantes s’intéressent à la recherche formelle menée par de jeunes auteurs francophones : le prix Femina 2009 Gwenaëlle Aubry et son roman Personne sera bientôt traduit pour le marché américain par un éditeur local. Décidément non, le succès des œuvres d’expression française ne se limite pas aux frontières de l’Hexagone !
Photographie : La librairie française Albertine à New York/© Nick Normal